Agenda républicain
Tridi 3 Nivôse
Jour du Bitume.
Tridi 3, Bitume. Les bitumes sont en général des substances combustibles, solides, molles ou fluides, d’une odeur forte, âcre et aromatique. Ils forment des couches dans l’intérieur de la terre, suintent à travers les roches, ou nagent à la surface des eaux. Ils brûlent avec une flamme rapide. On n’est pas d’accord sur leur nature ; les uns l’attribuent à des végétaux, les autres à des animaux enfouis, mais comme ces derniers contiennent une plus grande quantité de matière huileuse, ils paroissent avoir plus contribué à la formation des bitumes que les premiers. Les huiles et les graisses des animaux marins semblent donc être un des matériaux dont sont formés certains bitumes, tandis que d’autres ont une origine véritablement végétale et sont dus à des résines ou à des huiles essentielles, enfouies dans la terre. Parmi tous les bitumes connus, il y en a cinq espèces très distinctes ; savoir : le succin ou ambre jaune, l’asphalte ou bitume de Judée, le jais ou jayet, le charbon de terre et le pétrole.
La première espèce est le succin ou ambre jaune ; il renferme plusieurs insectes. C’est l’électron des anciens, et comme il attire les corps légers, toutes les substances qui ont la même propriété ont été appelées électriques. On le trouve principalement en Prusse ; il paroît dû à une résine végétale ; on n’est pas d’accord sur son origine. On en fait des bagues, des bijoux, des colliers pour les enfans ; on en trouve des morceaux d’une belle portée ; on en retire, par la distillation, une huile volatile et inflammable, un sel volatil, qui, mêlé avec l’ammoniac caustique forme l’eau de luce. Il y a plusieurs variétés du succin différemment colorées. L’ambre gris est une substance animale.
La seconde espèce de bitume est l’asphalte appelé aussi, bitume de Judée, poix de Montagne. Il est noir, pesant, solide, et assez brillant. Il acquiert, par le frottement, une légère odeur. On le trouve sur les eaux du lac Asphaltique ou mer morte, dans la Judée, près duquel étoient Sodôme et Gomorrhe, ce qui a donné lieu à la fable de l’incendie de ces deux villes, produites par la colère céleste, selon le récit de l’auteur de la bible ; on l’appelle pour cette raison Karabé de Sodôme. Les habitans du pays incommodés par l’odeur de ce bitume, nageant sur les eaux, et encouragés par le profit qu’ils en retirent, le ramassent avec soin. On trouve aussi de l’asphalte sur plusieurs lacs de la Chine. L’asphalte du commerce vient de Neufchâtel et du Walengin, on regarde l’asphalte comme le succin qui a éprouvé l’action d’un feu souterrein. Les Indiens et les Arabes l’emploient comme le gaudron, pour enduire les vaisseaux ; il entre dans la composition du vernis noir de la Chine, et dans les feux d’artifice qui brûlent sur l’eau.
Les pauvres Egyptiens, qui ne pouvoient pas se procurer des substances anti-septiques, plus précieuses, s’en servoient pour embaumer les corps, c’est de-là qu’on l’appelle gomme de funérailles, baume de momie ; on l’allie quelquefois avec la poix.
La troisième espèce de bitume est le jais ou jayet, qui est compact, brillant, vitreux dans sa cassure, et susceptible d’un beau poli. Il attire les corps légers comme le succin ; on en trouve dans le département de Vaucluse ; il contient des pyrites ; il se ramollit, quand on le brûle, et fournit de l’huile à la distillation. On l’employe pour faire des tabatières, des broderies, des bracelets, des boutons, des bijoux de deuil ; c’est à Wirtemberg qu’on le travaille.
Le charbon de terre vient ensuite ; (voyez houille).
Le pétrole est la dernière espèce ; on lui a donné ce nom et celui d’huile de pierre, parce qu’il coule entre les pierres, sur les rochers, ou dans différens lieux, à la surface de la terre. Cette huile diffère par sa légèreté, son odeur, sa consistance et son inflammabilité ; il y a plusieurs variétés de pétrole, on appelle naphte le plus transparent et le plus léger ; pétrole celui qui est plus épais et plus foncé, enfin la poix minérale, est le plus noir et le plus épais ; Le pétrole e trouve dans plusieurs endroits des départemens méridionaux. On le brûle en Perse pour s’éclairer ; on peut, si on en imbibe des mottes de terre, s’en servir pour le chauffage, mais il répand une fumée épaisse, et une odeur désagréable ; on pense qu’ol entroit dans la composition du feu grégeois. Il peut servir pour composer un mortier très-solide et très-durable ; on en retire une huile propre à gaudroner les vaisseaux ; quelques médecins ont conseillé des frictions et des fumigations de pétrole contre les maladies des muscles.