2 Floréal – Jour du Chêne

Agenda républicain

Duodi, 2 Floréal

Jour du Chêne.

Duodi, 2. Chêne. Ce bel arbre est extrêmement répandu dans les climats tempérés. Son utilité le fait rechercher par-tout. Il étend au loin ses rameaux, et son tronc est couvert d’une écorce raboteuse ; ses feuilles sont découpées, et ses fleurs monoiques ; il leur succède des fruits appellés glands renfermés dans une espèce de coupe : ce fruit a la forme d’une olive ; son écorce est dure et luisante ! Il renferme une amande d’un goût âpre.

Le Chêne devient plus ou moins gros selon le terrein : il y en a plusieurs espèces ; le Chêne rond, c’est le plus commun. Son bois est de la plus grande solidité pour la charpente des maisons et des vaisseaux, et pour la menuiserie ; afin de détruire les larves des insectes qui les attaquent, on le fait tremper, à moins qu’il ne soit destiné à faire des pilotis. Il se conserve alors plus de quinze siècles : c’est un excellent chauffage, et il donne de très-bon charbon. L’écorce du chêne réduite en poudre, est le tan brut, qui sert à préparer les cuirs ; la sciure de l’aubier et même celle du cœur du bois sont aussi employées à cet usage. Celle qui a passé les cuirs, se nomme tan préparé ; on en fait des mottes à brûler, ou en prépare aussi des couches dans les serres chaudes. L’écorce peut servir à teindre en jaûne brun : elle est astringente, et peut suppléer la noix de galle pour la fabrication de la couleur noire.

Le gland peut à la rigueur se manger ; quelques hommes en font leur nourriture les années de disette. On en prépare en le torrefiant et en le faisant passer au moulin, un pain peu agréable ; mais dans tous les lieux, ce fruit peut servir à engraisser les cochons et la volaille : l’amande fournit de l’huile.

Les feuilles de cet arbre ne peuvent servir qu’à fertiliser les terres par les sels que leurs cendres contiennent , ou en les convertissant en fumier ; mais leur usage moral et politique est du plus haut prix. Elles ornoient chez les Romains le front de celui qui avoit sauvé la vie à un citoyen : on les voit sur leurs médailles. La Couronne Civique ou de chêne est encore aujourd’hui le prix du vrai patriotisme et des vertus républicaines.

Le chêne a été renommé chez toutes les nations ; les Grecs l’avoient consacré à Jupiter ; et dans la forêt de Dodone, cet arbre étoit chargé de rendre ses oracles. Les prêtres des Gaulois, les Druides, perpétuèrent cette vénération pour le chêne, et il étoit parmi eux un objet sacré.

Il est couvert d’une multitude de mousses et de lichens : c’est aussi sur son tronc que croit le gui, ce végétal pour lequel seul les Druides sembloient honorer le chêne ; ils le cueilloient avec des rites particuliers et le distribuoient au peuple avec des cérémonies bizarres, au commencement de chaque année : c’est ce qui a donné lieu au proverbe : A Gui l’an neuf. Ce végétal fournit la glu, avec laquelle on prend les oiseaux.

C’est encore principalement sur le chêne que se trouve ce champignon nommé Agaric dans les boutiques, quoiqu’il appartienne au genre Bolet, puisqu’il est composé comme lui de filets tubuleux et non de lames, comme les Agarics ; on le nomme aussi vulgairement Agaric de chêne, du nom de l’arbre sur lequel on le trouve : c’est un purgatif violent ; cette substance rapprochée sous le marteau, sert en chirurgies pour arrêter le sang qui coule des blessures ; bouillie et séchée, c’est la matière de l’amadou : aussi les Botanistes appellent-ils ce champignon Bolet amadouvier.

Le tronc, l’écorce, le gland de chêne sont criblés, parcourus, dévorés par une foule d’insectes e différentes classes, le Lucane, ou cerf volant, les Scarabés, les Charanson, les Cantharide ; une foule de Coléoptères s’en disputent la possession. Les larves de plus de quarante Phalènes s’y attachent ; les Pucerons y sont en quantité innombrable ; mais les Cynips qui s’y fixent, méritent sur-tout l’attention de l’observateur ; ce sont eux qui produisent à la surface supérieure et inférieure des feuilles ces tubérosités qu’on prendroit d’abord pour des fruits, et qu’on nomme vulgairement pommes de chêne : ces tubérosités sont une maladie causée par la piquure de l’individu femelle d’un de ces cynips qui soulève la pellicule de ces feuilles pour y déposer ses œufs ; ils éclosent ensuite dans les excroissances causées par cette piqure, et les petites larves y trouvent à se nourrir. La galle la plus estimée est celle appelée noix de Galle : elle est due au Cynips noir, et se trouve sur le chêne dans le Levant ; cette substance très-astringente noircit sur-le-champ toutes les eaux qui contiennent du fer ; elle est la base de l’encre, et sert aux foulons, aux tanneurs, aux chapeliers et aux teinturiers.

Les autres espèces de chênes les plus remarquables, sont le chene liegier : voyez Liége ; le chêne vert. Ses feuilles sont lisses comme celles du houx ; son bois dur sert à faire des poulies et des manches de maillets ; son gland se vend dans les marchés, en Espagne, comme la châtaigne. Le chêne coccifère est un arbre en buisson, garni de petites feuilles lisses et luisantes ; il nourrit cet insecte utile, le Coccus du chêne, appellé vulgairement Kermès ; ce coccus ressemble à une petite coque sphérique attachée sur l’écorce de l’arbre ; c’est là qu’il se nourrit, se métamorphose, pond et meurt. On recueille cet insecte pour faire la couleur rouge, et on l’appelle dans le commerce graine d’écarlate. Nous voyons combien un seul arbre nous procure d’objets d’étude et d’étonnement. Ce n’étoit pas sans raison que Rousseau disoit qu’il lui suffisoit d’une botte de foin pour lui donner des sujets de méditation et d’amusement pour toute sa vie.

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